Du 13 au 21 Juin 2015 : Le centre du Pérou, 1ère partie
Buenos dias,
Petite mise en garde pour ceux que les paysages de montagne commenceraient à ennuyer : passer votre chemin, cet article ne traite que de ça ! Il faudra patienter jusqu’au prochain article pour un contenu plus culturel aux alentours de Cuzco.
Après notre randonnée, nous prenons deux jours de repos à Caraz. Repos mais pas seulement. Ces deux jours ont surtout pour but de préparer les quinze jours suivants. Au programme, la traversée du Pérou central par une piste qui me tient particulièrement à cœur et qui me trotte dans la tête depuis déjà quelques mois.
Notre support : le road book de deux anglais, Neil & Harriet Pike (Andesbybike) qui ont réalisé ce tracé il y a déjà quelques années. Leur philosophie me plait particulièrement car nous avons déjà pu la vérifier à plusieurs reprises : emprunter l’itinéraire qui reste le plus en altitude possible, car plus on est haut et plus c’est beau ! La contrepartie est évidente, le challenge est de taille avec des dénivelés assez faramineux et un tracé exclusivement en piste. Un tel topo est pour nous une pépite car il nous garantit de ne pas nous perdre à chaque embranchement de piste où les panneaux peuvent être absents…
Premier point, nous ré adaptons le début du topo (en fait toute la première moitié…) qui oblige normalement à redescendre à 1300m d’altitude pour ensuite remonter à 5000m. Une telle redescente est moralement pas très motivante donc nous « optimisons » la philosophie de base du tracé et choisissons ce qui semble la seule alternative viable à nos yeux et qui enchaine dès le début les cols à plus de 4000m. Dans les faits, ce choix ne nous épargne pas vraiment de dénivelé mais nous préférons alterner les montées/descentes plutôt que de réaliser 4000m de dénivelé positif d’une traite. Sur le papier, cet itinéraire nous plait : il permet de faire une dernière traversée de la Cordillera Blanca, de longer la Cordillera Huayhuash et de traverser la Cordillera Raura avant de repiquer sur la ville de Oyon où nous commencerons à suivre le topo. Seule contrepartie, nous n’avons donc presque aucune infos sur les pistes que nous allons emprunter sur la première partie : état, pente…
Deuxième point, ceux qui ont emprunté la piste sont unanimes, le tracé n’est pas une blague. Il faut être léger : le luxe c’est les paysages, disent-ils ! On entame donc un gros travail d’analyse : que peut-on supprimer de nos affaires ? Rien n’y échappe. Finalement, on réussit carrément à supprimer la remorque remplie de tout un tas de truc jugé « non indispensable ». Le tout sera envoyé par encomendias (transport de colis par bus) jusqu’à Cuzco, notre prochaine grande ville de passage.
Avant d’entamer ce parcours, la route nous amène rapidement à Yungay, tristement connue pour l’avalanche (suite à un séisme) qui recouvrit la totalité de la ville en 1970 et entraina la mort de la quasi-totalité de ses 25 000 habitants. Aujourd’hui seul l’immense cimetière en bordure de route rappelle cette catastrophe. La route nous amène ensuite à Huaraz, capitale du trekking et de l’alpinisme au Pérou. Nous n’y passons qu’une nuit afin d’envoyer notre colis d’environ 20kg (tout de même !) par bus à Cuzco. Nous achetons également des gants chauds en prévision des hauts cols qui nous attendent.
Traditions et technologie
Cimetière de Yungay
Voilà, dans notre tête, tout est réglé et nous nous lançons donc l’esprit tranquille. Sauf que le genou d’Elise en a décidé autrement et choisit ce moment pour se réveiller après de long mois de silence. Dès le premier jour de douce ascension, nous devons stopper après une quarantaine de kilomètres car la douleur s’est intensifiée à une vitesse fulgurante et ne permet plus à Elise de continuer. Nous appliquons en vrac tous les conseils que l’on nous a donné : anti-inflammatoires, étirements, arnica, beaucoup d’eau….
Le lendemain, incertain sur ce que nous réserve la suite, nous reprenons la route et bifurquons rapidement sur une piste qui doit nous permettre de traverser la Cordillera Blanca, cette fois ci en tandem. Nous passons à proximité d’une concentration de Puya Raimondii. Cette plante protégée, en voie de disparition peut atteindre jusqu’à 10m de haut ! Elle serait la plus grande plante au monde ! Elle peut vivre 100 ans avant de fleurir, suite à quoi elle meurt. On la trouve en de rares endroits des Andes Péruviennes entre 3000 et 4000m d’altitude.
Cordillera Blanca en tandem version "light"
Puya Raimondii
Après un petit bivouac à 4600m, nous franchissons le lendemain deux hauts cols. Les paysages sont tout simplement magnifiques. Chaque virage nous dévoile de nouvelles couleurs : vert, marron, orange. La piste noire serpente dans d’immenses étendues et passe à proximité de plusieurs glaciers. Nous découvrons un Pérou que nous n’aurions pas soupçonné, un Pérou aux allures d’Islande. On imaginerait tout à fait que des scènes du Seigneur des Anneaux aient pu être jouées ici. Seuls quelques rares bergers et leurs moutons habitent ces grandes étendues. Nous apprenons à nous méfier de leurs chiens souvent très agressifs que nous tenons en respect en les menaçant de cailloux que nous leur jetons de plus en plus souvent (et on est toujours ravis quand ils atteignent leur cible). Manque de bol, la météo n’est pas avec nous et les averses de neige nous suivront tout du long, masquant en bonne partie les paysages déjà époustouflants. Nous atteignons avec soulagement l’asphalte et atteignons frigorifiés la ville de Huallanca où nous dénichons un hôtel pour nous réchauffer et faire sécher nos affaires.
Bivouac à proximité du glacier Pastoruri
Juste avant Punta Huarapasca (4 820 m)
Entre les deux cols
Peu avant de rejoindre la route (en contrebas) nous menant à Huallanca
De là, nous reprenons la route et bifurquons à La Union pour retrouver la piste que nous conserverons sans interruptions pendant 11 jours. Nous traversons de charmants petits villages péruviens plantés au milieu de ce que l’on pourrait qualifier d’immenses alpages. Les gens nous semblent beaucoup plus sympathiques dans ces régions reculés que sur le début de notre parcours au Pérou. Alors que nous franchissons à nouveau la barre des 4000m d’altitude, les paysages deviennent à nouveau superbes. Les bivouacs sont faciles si ce n’est qu’il faut toujours composer avec la pluie, anormale pour la saison…. Nous repartons de notre second bivouac avec 5kg de patates gracieusement offerts par les propriétaires du champ qui ne connaissent pas la problématique « poids » en vélo, mais on ne leur en veut pas pour autant...
Séchage du mais : noir, jaune, blanc, violet
Il l'a fait : regonfler son pneu de voiture avec une pompe à vélo (on était sceptique) - Village de Parsacha
Village de Antacolpa
Les gentils donateurs des 5kg de patates
Une éclaircie pendant laquelle on se dépêche de replier la tente pour l'une et de prendre une photo pour l'autre
L'un des quelques véhicules motorisés que nous croisons dans la journée
Commence alors la traversée de la Cordillera Raura, tout aussi belle que la Cordillera Blanca que l’on pourrait qualifier de route (ou plutôt piste) des lacs. Nous en longerons probablement une vingtaine en deux jours, entourés de décors aux verts phosphorescents. Nous faisons de belles rencontres sur la piste, un cavalier qui nous parle de son élevage de chevaux, un autre ayant parcouru 6h de canasson pour venir pécher quelques maigres poissons dans l’un de ces lacs reculés. La vie ici nous semble hors du temps. A mesure que nous effectuons l’ascension, les habitations se font plus rares. Nous arrivons tout de même à un petit village, à proximité de la laguna Patarcocha. On nous y fait un bel accueil et chaque membre du village prend la peine de venir nous serrer la main. L’une des familles nous invite à manger leur plat typique : patates chaudes accompagnées d’une bonne tranche de fromage et de maïs frit salé (simple et délicieux). Ici, les maisons sont simples et sombres avec un sol en terre battue, aucune ne comporte de fenêtres, dur à envisager pour nous. Malgré le froid, ces maisons ne vous invitent pas à rester à l’intérieur. Nous installerons finalement notre campement près de la laguna dès le début d’après midi car les averses de pluie s’enchainent et nous ne souhaitons pas tenter le col dans ces conditions. Sans parler que nous avons eu d’autre choix que de tenter de passer un petit passage à gué sur le tandem dans la matinée, ce qui s’est soldé par un échec et nos chaussures totalement trempés (foutus pierre…). Dans la région, nous apprenons aussi à nous méfier de l’eau car certains points d’eau et cours d’eau sont pollués par les mines. C’est le cas de cette laguna, polluée par les rejets des mines Raura en contrehaut.
Magnifique et immense lagune
Et la deuxième d'une longue série
Retour de pêche
Village à proximité de la laguna Patarcocha
Le lendemain, c’est le retour du beau temps, un vrai bonheur. Nous profitons pleinement de la vue des glaciers qui ne sont pas bien loin. Peu avant le col, nous arrivons finalement à la mine Raura. Impossible de la visiter sans autorisation préalable mais nous arrivons à en apprendre un peu plus : cette mine extrait du zinc, du plomb et du cuivre, on se demande par quel hasard tous ces minerais se trouvent dans la même zone. La mine fonctionne déjà depuis 50 ans et on nous parle d’en tirer profit encore une 20aine d’année.
Lorsque nous passons le col au milieu de pans de montagne aux couleurs orangées, on n’a pas de mal à croire que le sol réserve quelques richesses à la hauteur de la beauté de paysages.
A proximité de la mine Raura (en contrebas)
Punta Raura (4 770 m)
Redescente vers la ville de Oyon
Une longue descente nous amène à la ville de Oyon qui signe la fin de la première moitié de notre itinéraire. C’est ici que nous rejoignons « The great divide » (le topo de Andesbybike) que nous suivrons pour la deuxième partie. C’est aussi durant cette journée que nous franchissons le seuil symbolique des 20 000 kilomètres. Nous prenons un jour de repos, qui nous sert avant tout à donner un peu de répit au genou d’Elise et à régler quelques soucis mécaniques. Après avoir tapé à toutes les portes du village, on finit par trouver le seul soudeur d’aluminium du patelin qui nous répare notre béquille qui s’est cassée durant la piste. On a pu se rendre compte en seulement deux jours à quel point elle nous est indispensable ! Malheureusement elle recassera le jour suivant…
Récit à suivre dans le deuxième épisode….
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